2004-05

Nous avons approfondi l’étude pluridiscplinaire des pratiques de travail et d’organisation, saisies dans leurs contextes et leurs historicités propres. Cette manière de considérer le monde du travail s’oppose aux projets qui abordent cet objet seulement au travers des intentions des organisateurs (dirigeants, actionnaires, chefs ou encore administrateurs) et des instruments officiels d’organisation du travail (règlements, plans, rapports, dispositifs gestionnaires, etc.). Il s’agit plutôt dans ce cas d’appréhender les pratiques des acteurs observés empiriquement pour saisir la manière dont sont construits ces instruments de gestion, leurs applications dans des contextes variés et leur appropriation/renégociation par les acteurs. Le dossier sur les classifications professionnelles paru dans Sociétés Contemporaines (n° 54, 2004) offre une illustration de ces perspectives.

Durant l’année 2004-2005, des chercheurs du groupe sont intervenus à partir de leurs travaux. Ainsi, Michèle Charbonneau, chercheuse en gestion, a présenté son enquête sur les dirigeants d’entreprise et les objets techniques ; Anne-Sophie Beau, historienne, est intervenue sur les formes d’emploi et les carrières des employé(e)s dans les grands magasins ; Pierre-Antoine Dessaux, historien, a proposé de revenir sur la construction d’un marché à partir de l’exemple du marché des pâtes alimentaires ; Caroline Datchary, sociologue, a soumis à discussion ses observations sur l’effet dispersant des NTIC sur le travail des cadres, et Agnès Labrousse, économiste, a présenté sa recherche sur les relations industrielles en Allemagne orientale, entre transfert et hybridation.

En parallèle, le groupe a consacré une partie du séminaire à la préparation du colloque international « Travail et organisation : recherches croisant ethnographie et histoire » (Maison méditerranéenne des sciences de l’Homme, Aix-en-Provence, 30 et 31 mai 2006), dont il est à l’initiative. Ce projet de colloque s’appuie sur le constat que, depuis plusieurs années, des recherches de sciences sociales portant sur les pratiques de travail et d’organisation combinent des modes d’investigation relevant de l’ethnographie et de l’histoire, et travaillent à l’articulation du présent et du passé. Le colloque vise à rendre compte de la diversité des pratiques de recherche qui combinent ainsi l’ethnographie et l’enquête par archives sur le terrain du travail, à identifier ce qui impose aujourd’hui cette démarche à des chercheurs en sciences sociales et à comprendre ce qu’on peut attendre, en termes de renouvellement théorique, d’une telle confrontation des analyses du présent et du passé sur un objet donné. Nous avons consacré une séance à partager des expériences d’enquête et repérer les raisons pour lesquelles nous sommes plusieurs dans le groupe à avoir associé ces deux démarches dans nos recherches. Ensuite, dans la continuité de l’année précédente, nous avons organisé une journée d’étude avec des chercheurs qui ont croisé cette question dans leurs travaux : Florence Weber sur les relations entre les métiers d’historien et d’ethnographe et Alain Cottereau sur l’étude des pratiques d’organisation et de travail dans la première industrialisation. Enfin, Michel Pialoux a accepté de revenir, dans une séance de séminaire, sur son itinéraire d’enquête sur les transformations du groupe ouvrier dans le secteur automobile, tandis que Claire Zalc, historienne, et Gilles Laferté, sociologue, ont présenté une enquête collective qu’ils coordonnent sur les trajectoires familiales et les relations économiques reconstituables en historiens-ethnographes à partir des archives privées d’une petite entreprise de confection et de commerce de Lens.